« En marge du Front National, des mouvements d’extrême droite font leur apparition en France grâce à l’avènement d’Internet. En Auvergne, les Identitaires sont particulièrement actifs.
Depuis quelques années, le développement d’internet a été salvateur pour libérer la parole politique et idéologique. Alors que le Front National était jusqu’alors le seul représentant de l’extrême-droite – un courant fourre-tout – les blogs et les réseaux sociaux sont devenus autant d’espaces à occuper pour toutes les mouvances qui souhaitaient s’affranchir de ce parti. Bien que peu nombreux, les Identitaires sont actifs en Auvergne et ont un sens de la communication assez poussé usant des dernières technologies pour s’exprimer, diffuser leurs idées et relayer leurs faits d’armes. Matthias Bernard, professeur d’histoire contemporaine à l’Université Blaise Pascal Clermont II doyen de l’UFR de Lettres, Langues et Sciences Humaines, décrypte ce phénomène.
Pourquoi l’Auvergne n’est pas un terreau fertile pour les mouvances d’extrême-droite ?
L’Auvergne est en fait l’une des régions françaises les plus réfractaires à l’extrême-droite. Et cela pour deux raisons : sa situation géographique et sa population. Les courants d’extrême-droite s’implantent plus facilement et durablement dans les régions périphériques qui sont soumises à l’immigration des pays frontaliers ainsi que dans les grandes villes. L’Auvergne est une région centrale et qui était, encore récemment, à forte majorité rurale, or, l’extrême-droite a du mal à pénétrer le monde paysan. Du moins c’est le cas pour l’extrême-droite électorale (le FN). L’extrême-droite activiste (le Bloc identitaire par exemple) est bien plus difficile à mesurer..
Le Bloc identitaire est assez actif sur la toile auvergnate, qui sont-ils ?
Les identitaires d’Auvergne font partie de ce que j’appelle l’extrême-droite activiste. Ils ne sont pas nombreux mais lancent des actions « coups de poing » qui font sensation. C’est un courant relativement récent qui appartient à la même famille de l’extrême-droite que des groupes tels que « Occident » ou « GRECE ». Il veulent défendre l’identité et la civilisation européenne contre l’invasion islamiste et l’impérialisme américain.
Mais les identitaires se disent plus Arvernes (peuple gaulois du Massif Central) que Européens ?
Ce qui est assez nouveau avec ce mouvement, c’est qu’ils s’appuient sur des identités locales, ils prônent un retour à une identité infra-nationale. C’est une bonne stratégie : ils se focalisent sur le terrain local. Cela est d’autant plus facile quand, comme en Auvergne, l’attachement à la terre est aussi fort.
Ils semblent aussi se référer à Vercingétorix ?
Cela peut paraître en effet un peu déconcertant. Vercingétorix était une figure de la gauche républicaine. La droite et l’extrême-droite se reconnaissaient plus dans des personnages historiques comme Clovis ou Jeanne d’Arc. Dans la résistance, Vercingétorix est considéré comme le premier résistant et même le premier déporté de l’histoire nationale. Mais récemment, certaines mouvances d’extrême-droite ont pris à leur compte leur héros gaulois. Il voit aussi Vercingétorix comme le premier à avoir résisté à l’invasion romaine et latine, de même qu’ils disent résister à l’invasion islamiste«
Propos recueillis par Sandra Lorenzo